Intervention d’Henry de Lesquen, président de l’U.R.V.,

au Conseil municipal du 28 juin 2001

 

La création de l’avenue de l’Europe a été un grand événement pour la Ville, jusqu’alors prisonnière du plan royal et du trident l’orientant vers le Château, puisque ce premier axe nord-sud a permis de commencer à reconstituer une unité urbaine sur un autre plan. L’amélioration de cet axe est donc essentiel pour l’unité, l’identité et le développement de Versailles. Nous avions fait des propositions pour donner un cœur à la Ville. Il y a pour cela d’autres choses à faire que cette opération, mais elle est en elle-même très intéressante, puisqu’elle va rendre un peu de caractère à l’avenue de l’Europe, qui pour l’instant est assez « tiers-mondisée » et, pour tout dire, affreuse.

J’ai bien noté, M. le Maire, que vous vous occupiez personnellement de cette affaire depuis sept ans, c’est-à-dire depuis 1994, et que la négociation avait été compliquée. Le projet en lui-même va dans le bon sens, mais plusieurs questions méritent d’être soulevées à propos de cette affaire, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle manque de transparence.

On ne peut d’abord que s’interroger sur la soudaine précipitation de la mairie à faire passer un projet qui traînait depuis 1977. Il n’était pas inscrit à l’ordre du jour et il faudrait maintenant l’approuver de toute urgence… Cette fébrilité est bizarre.

Une fois de plus, la décision ne porte que sur une partie d’un projet dont on nous explique mal la conception d’ensemble. Même en commission de l’urbanisme, nous n’avons pas traité de l’ensemble du projet. Or, la vente du “Panier fleuri” à l’entreprise Léon Grosse n’a de sens qu’en fonction de l’aménagement prévu dans le permis de construire. Si vous aviez eu pour le Conseil municipal toute la considération qu’il mérite, vous auriez demandé à vos collaborateurs de nous donner cette information en détail. Ce serait indispensable pour nous prononcer en connaissance de cause.

L’entreprise Léon Grosse a une solide réputation sur le plan technique, même si son nom a été cité dans la célèbre affaire des marchés truqués de l’Ile de France. Je ne dis pas que son projet est mauvais, mais rien ne prouve qu’un autre groupe n’aurait pas une meilleure idée. Si vous l’aviez mise en concurrence, comme il aurait été normal, peut-être aurait-on trouvé mieux. Pourquoi réserver à Léon Grosse l’aménagement du “Panier fleuri” ? Cette absence de mise en concurrence est d’autant plus regrettable que le prix de vente paraît notablement sous-estimé.

 

- (En réponse à une interruption de M. Devys, qui avait hurlé : “Achetez-le !) Restons sérieux, il s’agit des finances de la Ville et de déontologie. -

 

M. Gressier a jugé aussi le prix de vente sous-estimé. L’estimation des Domaines est unique, les précédentes sont caduques au bout d’un an. On nous a dit à la commission que cette estimation était de 10,54 MF. La Ville ne demanderait à Léon Grosse que 9,6 MF, dont il faut déduire 2,2 MF d’indemnité d’éviction, ce qui laisse 7,4 MF. Au passage, je trouve curieux d’évincer ces personnes pour un prix qui paraît élevé, alors que, dans le projet de Léon Grosse, il est prévu la réinstallation d’une brasserie. De plus, je ne sais pas sur quels éléments repose l’estimation des Domaines et il aurait été intéressant d’en discuter, au moins en commission. Je sais seulement que leurs estimations sont en général très raisonnables et plutôt en dessous des conditions du marché. Or, nous sommes là dans un endroit stratégique, en Centre-Ville. Il est très étonnant qu’on en soit réduit à vendre en dessous de l’estimation des Domaines. Faute de disposer de leur estimation, je livre un calcul très simple, qui vaut ce qu’il vaut, mais donne un ordre de grandeur. Il y a 4.000 m2 de surface nette, dont le prix est bien du 20.000 francs le m2, à cet emplacement. Le prix de la construction devrait être d’au moins 80 MF. D’ordinaire, dans une opération de ce genre, le poids du foncier représente 30 à 50 %. Retenons le bas de la fourchette, 30 % : cela met à 24 MF la valeur du terrain, bien au-dessus des 7,4 MF qui nous resteront. On peut donc légitimement se demander si les intérêts de la Ville ont été bien défendus dans cette affaire, et je ne vois pas, dans ces conditions, comment nous pourrions ne pas voter contre cette délibération.

De plus, j’ai encore une question à poser, M. le Maire, et ce n’est pas la moindre. Pourquoi l’entreprise Léon Grosse a-t-elle financé votre campagne pour les élections législatives de 1993, comme le prouve le document publié au Journal Officiel ? Les Versaillais seraient heureux d’avoir des éclaircissements sur ce point.